Comment intervenir avec un enfant opposant
Je ne saurais dire si ce sont mes nombreuses expériences « sur le terrain » ou le fait que la problématique est vraiment plus présente, mais j’ai l’impression que l’on voit plus d’enfants opposants dans les familles et dans les milieux de garde. Il se passe rarement une semaine où je n’aborde pas la question de l’opposition chez les enfants avec un parent ou un intervenant. Phase normale du développement ou problématique plus sévère à l’âge scolaire, l’opposition est de nos jours un sujet de prédilection.
En cherchant un peu pour m’outiller davantage sur le sujet, je suis tombée sur le site Internet de Gilles Cloutier, psychologue. Il se spécialise dans la problématique du « trouble d’opposition avec provocation » et son site Internet aborde le sujet sous différents angles. La page d’accueil renferme une citation particulièrement intéressante sur le sujet. La voici : « Les enfants représentent la plus belle richesse de l’humanité par l’espoir du monde meilleur qu’ils portent en eux. Mettre un enfant au monde est en effet la plus grande source de joie qu’il soit donné de connaitre. Mais paradoxalement, à mesure que l’enfant grandit, il peut arriver qu’il devienne progressivement une source d’inquiétude, de désolation. » Cette citation s’adresse en premier lieu aux parents des enfants opposants. En lisant ceci, ma vision s’est tout de même élargie, car j’ai pensé à vous, les éducatrices qui avez la chance de travailler quotidiennement avec la plus belle richesse de l’humanité. Comme les parents, vous pouvez vous aussi être confrontée à certaines inquiétudes face au développement de ces enfants.
Il est important de comprendre que l’opposition peut être abordée sous deux angles différents : l’opposition dite « développementale » et l’opposition dite « problématique ». Tous les enfants manifesteront de l’opposition au cours de leur développement. Rappelons brièvement la phase appelée « terrible twos » où l’enfant tente de s’affirmer en passant par le chemin de l’opposition. Il tentera, en agissant ainsi, d’affirmer son individualité dans son environnement et avec les autres. L’opposition est souvent la première manifestation de l’autonomie. Cependant, cela peut devenir un problème lorsqu’elle est trop fréquente, trop intense et nuit à son développement. Par ailleurs, seulement 3 à 5 % des enfants développeront un TOP (Trouble d’opposition avec provocation). Lorsque la problématique persiste au-delà de la phase développementale normale et qu’elle est présente depuis au moins 6 mois, on peut alors parler de TOP. Une évaluation par des professionnels doit alors être faite pour confirmer ou infirmer ce diagnostic. Certaines manifestations peuvent être observées dans une telle situation : refus de se plier aux demandes, contestations, se tenir la tête, se moquer des conséquences, l’enfant est souvent fâché, en colère, il provoque souvent l’adulte et fait des crises de larmes importantes. Ces signes sont présents au-delà de l’âge de 5 ans.
En tant qu’éducatrice, vous serez probablement peu confrontée aux enfants ayant reçu un diagnostic, puisque ce dernier vient généralement plus tard. Par contre, si on comprend bien la trajectoire de la problématique, plusieurs comportements d’opposition normaux ou pas seront présents dans la petite enfance. Vous devez alors, selon moi, être bien outillée face à cette problématique pour pouvoir y faire face adéquatement et ce, sans trop vous épuiser.
Pourquoi ce trouble apparait-il? Il est important d’en prendre conscience, car vous pourrez agir différemment en connaissant la source du problème.
- L’enfant ne se sent pas reconnu dans ses besoins, son individualité, sa recherche d’autonomie.
- Il n’y a pas de lien parent-enfant établi.
- Il a appris que l’opposition peut être payante (il obtient ce qu’il veut en agissant ainsi).
- Une composante génétique pourrait aussi être la source de l’opposition.
Comment intervenir avec un enfant opposant? Que ce soit pendant la phase développementale normale ou lorsque la problématique semble s’être installée, les interventions auront un impact majeur sur le comportement de l’enfant.
- Il est important de se rappeler que l’argumentation est le carburant de l’opposition. Plus vous argumenterez, plus l’enfant s’opposera. L’inverse est tout aussi véridique; moins vous argumenterez, moins il s’opposera.
- Offrir de l’amour et du temps de qualité à l’enfant. La relation que vous avez avec lui est la base de tout. Prenez le temps de bien établir celle-ci avant d’intervenir.
- L’enfant opposant n’est pas toujours conscient de son comportement. Il agit sans penser et se retrouve souvent en punition/conséquence. Son estime de soi est alors en chute libre. Nourrir les bons moments avec lui.
- Éviter de donner de l’attention négative au comportement négatif. L’enfant obtient alors ce qu’il veut. Dans la mesure du possible, appliquer l’ignorance intentionnelle.
- Donner le plus d’attention positive possible. Relever les bons coups de l’enfant, souligner les efforts qu’il faits, lui dire que vous êtes fière de lui lorsque son comportement est adéquat.
- Éviter de dire « non ». Pour un enfant opposant, le « non » sert souvent de déclencheur de crise.
- Donner de faux choix à l’enfant, lui donner l’impression qu’il prend une décision. Il aura moins tendance à s’opposer et se sentira compris dans ses besoins, dans son individualité.
- Par-dessus tout, faire preuve de patience. L’opposition peut devenir lourde pour un adulte. De petites interventions simples pourront, à long terme, éviter qu’une problématique plus sérieuse s’installe.
Bien sûr, certains enfants représentent des défis pour les adultes, parents, intervenants et éducatrices. Prenez le temps d’aller chercher de l’aide au besoin. Vos interventions auront un impact important sur l’enfant opposant, elles ne doivent en aucun cas être prises à la légère. N’oubliez pas que les défis nous font grandir…
Maude Dubé, éducatrice spécialisée
L’Association des parents de l’enfance en difficulté a défini la problématique ainsi : Le TOP se caractérise par l’ensemble de comportements négatifs, hostiles ou provocateurs qui durent pendant au moins 6 mois.