Pandémie de grippe : exclusion
De tout temps, la quarantaine a été un moyen de combattre les épidémies.
Rester chez soi lorsqu’on est malade semble aller de soi, mais n’en soyez pas si sûre…lorsque les Québécois sont malades, ils se rendent au travail dans la moitié des cas soit plus que le reste des Canadiens! Pas étonnant qu’ils amènent leurs enfants au service de garde alors qu’ils sont encore franchement malades. Ce qui ne nous tue pas, nous rend plus fort, pensons-nous.
Un parent canadien prendra 4 jours par année pour s’occuper de son enfant malade. Beaucoup moins que nos voisins américains et loin derrière les Australiens. Mais, pensez-vous qu’une pandémie va changer la situation? Que les parents vont se mettre subitement à garder leurs enfants à la maison dès le premier symptôme? Probablement en partie, mais ça ne se fera pas sans grincements de dents. Une des difficultés que j’entrevois durant cette pandémie c’est l’exclusion des enfants atteints de la grippe. D’accord, personne n’aime être exclu, mais c’est parfois nécessaire. De plus, les politiques d’exclusion devraient plutôt être nommées politiques de protection de l’enfant malade.
Quiconque travaille dans un service de garde en installation ou en milieu familial a déjà eu à exclure un enfant malade et à gérer les problèmes que cela génère avec les parents.
Or, déjà, nous avons de la misère à exclure un enfant plus d’une journée en cas de gastro ou de fièvre élevée et maintenant on nous demande de les exclure jusqu’à la fin des symptômes soit de 3 à 7 jours! Comme on dit en québécois : « On n’est pas sortis du bois! ». Il y a une difficulté évidente à faire comprendre aux parents, l’importance du retrait de l’enfant lorsqu’il est malade, autant pour le bien de l’enfant que pour le bien de tous ses compagnons.
Comment allons-nous gérer autant d’exclusions en si peu de temps? Je vous rappelle que chaque vague de grippe dure environ 8 semaines, avec un pic de deux semaines où plusieurs personnes sont malades. Je vous rappelle également que les enfants attraperont d’autres infections que la grippe cette année…
Voici ce qui nous est demandé (site Pandémie Québec) :
- Retrait des enfants jusqu’à la fin des symptômes grippaux
- Appliquer les recommandations de la santé publique, dont celle de demander aux parents des enfants qui présentent des symptômes d’allure grippale (ex.: fièvre et toux avec maux de tête, grande fatigue ou courbatures) de ne pas se présenter au service de garde, et ce, jusqu’à la fin des symptômes.
Voici ce qui risque d’arriver comme situation :
- Le parent donne des antipyrétiques (Advil™, Tylenol™) avant le départ de la maison, essayant de camoufler la fièvre, un symptôme important (mais non le seul…).
- Le parent prétend que ce n’est pas la grippe, mais une autre infection (otite, sinusite, etc.) et est fâché que son enfant soit exclu. (Ce sera probablement le principal argument)
- Le parent prétend que son enfant a déjà contracté la grippe A H1N1 dans une vague précédente, donc que vous devez forcément vous tromper...
- Ou encore, le retour est trop rapide. Souvent, on exclut rapidement et c’est excellent, mais l’enfant réintègre rapidement les rangs encore contagieux…
Je vous propose alors une toute nouvelle façon de travailler que vous pourriez adopter dans plusieurs situations, même hors-pandémie :
Puisque l’exclusion rapide est importante pour limiter le nombre de cas de grippe et que nous ne sommes pas tous médecins et ne sommes pas à l’abri des erreurs, je vous suggère ce que j’ai baptisé l’exclusion évolutive. C'est-à-dire que dès l’apparition de fièvre, toux, fatigue et courbatures, on exclut l’enfant dans l’heure suivante pour au moins 24 heures (vomissements et diarrhées pour la gastro). À tous les jours, un responsable du service de garde contacte le parent pour prendre des nouvelles de l’enfant et discuter avec le parent de l’état de santé de l’enfant. Ce n’est qu’après avoir eu le OK du responsable que le parent ramène l’enfant.
Pourquoi cette façon de fonctionner?
- Si les symptômes disparaissent rapidement, en moins de 24 heures, ce n’est probablement pas la grippe. L’enfant pourra réintégrer rapidement. Si c’est la grippe, les symptômes seront présents pour quelques jours.
- Si le parent se présente avec son enfant le matin suivant sans avoir discuté avec le responsable, il peut se voir contraint de retourner à la maison avec celui-ci causant ainsi plus de problèmes de « logistique » (travail, gardienne, etc.)
- Si vous décidez d’exclure et que vous adoptez le retour fixe et rigide de 4 à 7 jours. Il y aura probablement des parents qui seront pénalisés car l’enfant n’a pas eu la grippe, mais une autre infection.
Être trop rigides (exclure et fixer un retour fixe de 4 à 7 jours) nous amènera des problèmes et être trop complaisants aussi (éviter d’exclure par peur de se tromper d’infection). Le juste milieu semble tout indiqué.
Je crois que pour la pandémie, nous devrons rester fermes mais souples à la fois. Notre but sera en sorte que la société « continue de travailler » tout en protégeant la santé des enfants dont nous aurons la charge.
L’exclusion des enfants atteints sera un très bon moyen d’y arriver en plus de tous les autres efforts que vous aurez à déployer du côté de l’hygiène et de la désinfection. Plus la personne malade est isolée, moins elle est en contact avec les autres, moins il y a de risque qu’elle partage ses microbes, c’est un dogme infectieux encore aujourd’hui.
Vous pouvez utiliser le billet fourni dans la section Educa-germe d’educatout.com.(Ouvrir PDF Billet- exclusion évolutive)
Prenez la situation au sérieux sans paniquer!
Nathalie Thibault B.Sc. M.Sc.
Consultante en prévention des infections
Propriétaire de Germaction